• L’économie collaborative a les couleurs de l’auberge espagnole. Opportunité pour construire un nouveau cycle de progrès, nouvelle étape du capitalisme et pourvoyeur d’une société low cost et financiarisée… En fait, elle ne sera que ce que nous en ferons. Premières réflexions, qui n’ont pas vocation à être exhaustives, mais à  ouvrir le débat.

    cadre info 02.2016

    Depuis le lancement de la campagne pour le droit à la déconnexion et la réduction du temps de travail, l’Ugict-CGT affirme : « le sens des transformations induites par le numérique dépendra du rapport de forces entre le capital et le travail ». Laissée au seul capital, la révolution numérique peut se traduire, à très court terme, par l’émergence d’une économie du low cost avec la suppression de millions d’emplois, notamment intermédiaires. Mais le numérique, parce qu’il fonctionne sur le mode de l’horizontalité, le partage d’informations, la collaboration et la désintermédiation peut aussi permettre d’ouvrir un nouveau cycle de progrès social, environnemental et économique. Possibilité de construire une société, post-capitaliste pour certains, mutation du capitalisme permettant de renforcer les logiques low cost et la financiarisation pour d’autres, l’« économie collaborative » reste à définir.

    économie collaborative, de quoi parle-t-on ?

    Économie collaborative, le mot est à la mode. Wikipédia – qui connaît bien le sujet, étant un exemple d’économie collaborative – la définit comme «  une activité humaine qui vise à produire de la valeur en commun et qui s’appuie sur une organisation plus horizontale que verticale, la mutualisation des biens, des espaces et des outils (l’usage plutôt que la possession), l’organisation des citoyens en « réseau» ou en communautés et généralement l’intermédiation par des plateformes internet ».

    L’économie collaborative privilégie l’usage sur la propriété et repose sur la mutualisation des ressources possédées par chacun et sur l’optimisation des usages. Avec les plateformes internet qui permettent aux individus d’entrer en relation et de s’auto-organiser en fonction de leurs intérêts et de leurs besoins, le numérique permet d’élargir considérablement des pratiques de partage anciennes comme le covoiturage et la colocation. Chaque jour, de nouveaux exemples de consommation collaborative se créent. Elles ont en commun de permettre une limitation des coûts, mais génèrent aussi une plus-value environnementale et/ou sociale :

    • Partage d’un bien, comme l’autopartage, qui permet d’optimiser l’utilisation d’une voiture (une voiture reste à l’arrêt plus de 90 % du temps), et ainsi de limiter les nuisances liées aux besoins de stationnement.
    • Échange d’un bien ou d’un service, comme les pratiques de « couchsurfing » qui permettent d’échanger des possibilités d’hébergement, de démocratiser les voyages et surtout de développer le lien social en découvrant un pays ou une région en partageant la vie quotidienne de ses habitants.
    • Relation directe du producteur au consommateur, avec par exemple le développement des AMAP (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne), qui permettent de contourner les réseaux de grande distribution et d’assurer ainsi un prix « équitable » au producteur, de favoriser les circuits courts, tout en assurant la qualité du produit et sa traçabilité pour le consommateur. Développées à grande échelle grâce au numérique, les AMAP pourraient offrir la possibilité à l’agriculture de sortir de l’impasse du productivisme.

    Lire la suite sur : http://www.ugict.cgt.fr/publications/cadres-infos/leconomie-collaborative-un-modele-a-construire

    PLAN DE L'ARTICLE :

    Le bouleversement des paradigmes

    Protéger l’économie collaborative de la finance

    Un principe : les communs

    Une fiscalité adaptée aux nouveaux modes de création de valeur

    Quel statut pour les contributeurs indépendants ?

    CONCLUSION :

    Si le monde du travail ne réussit pas très rapidement à imposer des régulations et règlementation, la révolution numérique se traduira par la fin des modèles sociaux gagnés par les luttes sociales du 19ème et 20ème siècle, et par une nouvelle phase de financiarisation du capitalisme.

    Permettre au monde du travail de peser sur ces mutations, c’est l’objectif de l’Ugict-CGT.

    Publié le vendredi, 29 janvier 2016 dans Cadres Infos numéro 724 à télécharger ici en .pdf


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  • NICOLAS DUTENT : L'Humanité du 29/01/2016

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    Jean-Marie Harribey économiste <details class="credit"></details><details class="credit"> / LA NETSCOUADE </details>

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    La revendication d'un revenu universel de base et inconditionnel est longtemps apparue comme incongrue. Cette mesure est-elle une arme efficace pour lutter contre le chômage, la précarité et la pauvreté ?

    JEAN-MARIE HARRIBEY : Malheureusement, la plupart des partisans du revenu de base se placent dans l'hypothèse de la fin du travail et du plein-emploi, voire du refus du travail car celui-ci ne serait pas un facteur d'intégration dans la société. Or, le travail est certes aliénant sous sa forme salariée car installé dans un rapport de subordination, mais il est porteur de reconnaissance sociale. De plus, le chômage n'est pas une fatalité mais le résultat d'un capitalisme très violent et inégalitaire qui a capté de plus en plus de valeur au détriment du travail. Non seulement le revenu de base n'ouvre pas la voie à une sortie du capitalisme, mais le risque est qu'il soit utilisé pour libéraliser un peu plus le marché de l'emploi car, la société assurant un tel revenu, les employeurs en profiteraient pour baisser les salaires. Les libéraux intelligents comprennent le parti qu'ils pourraient en tirer : abolir la protection sociale actuelle et renvoyer le travailleur à sa condition d'individu isolé qui est, paraît-il, maître de ses choix et en mesure d'arbitrer entre travailler un peu, beaucoup ou pas du tout. Mais il existe une alternative progressiste au revenu de base. C'est celle qui couple une réduction forte du temps de travail avec l'enclenchement de la transformation du système productif pour répondre aux énormes besoins sociaux et écologiques, indispensable pour dépasser le capitalisme productiviste.

      Benoît Thieulin président du conseil national du numérique

    BENOIT THIEULIN :  En effet, le revenu de base commence à faire de plus en plus parler de lui et les expérimentations se multiplient : c'est bien normal, puisqu'il porte une nouveauté politique qui trouve difficilement son équivalent ces dernières années. C'est pourquoi le rapport sur le travail, l'emploi et le numérique, que le Conseil national du numérique a remis récemment à la ministre du Travail, préconise que soit étudiée la faisabilité d'un tel dispositif, dans le cadre d'études menées par des économistes, des fiscalistes, des juristes... La lutte contre la précarité ne doit pas se confondre avec celle contre la pauvreté, bien que, du fait de l'augmentation des travailleurs pauvres, notamment, ces deux enjeux soient de plus en plus liés. Le revenu d'existence permettrait de sortir de la logique, souvent délétère, de conditionnalité des aides sociales. Alors que le taux de non-recours au RSA s'élève à plus de 30 % pour le RSA socle et à 70 % pour le RSA activité, il semble difficile de soutenir la nécessité de la conditionnalité comme outil de ciblage fin des dépenses sociales et comme alpha et oméga des politiques de lutte contre la pauvreté. La logique de ciblage semble avoir atteint ses limites, du fait notamment de la complexité des dispositifs, que l'administration fiscale elle-même ne contrôle plus. Il est d'ailleurs édifiant de constater que la nouvelle prime d'activité a été conçue sur la base d'une hypothèse d'un taux de non-recours de 50 % ! Mais l'objectif du revenu d'existence ne se résume pas à la lutte contre la pauvreté par la simplification des dispositifs d'aide : il s'agit également de valoriser les parcours hybrides et la pluriactivité sans que cela soit synonyme, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, de précarité. C'est enfin le moyen de soutenir d'autres formes d'activité, non marchandes, porteuses d'innovation sociale et de solidarité.

    Deux questions épineuses demeurent : comment finance-t-on ce revenu et comment fixe-t-on son montant ?

    JEAN-MARIE HARRIBEY : La question suppose le bien-fondé de ce revenu, ce qui ne va pas de soi. Pour une autre raison encore. Ses partisans arguent qu'il serait automatiquement financé parce que les individus se livreraient à des activités autonomes, utiles et créatrices de lien social. Or la richesse ­ c'est-à-dire les valeurs d'usage ­ ne se transforme pas par magie en valeur économique susceptible d'être distribuée sous forme de revenus. Il n'existe que deux moyens pour y parvenir : soit par le marché lorsque la vente des marchandises valide les anticipations des capitalistes ; soit par la décision collective de valider des activités monétaires non marchandes comme l'éducation, la santé publique (au niveau de l'État), les crèches, les bibliothèques (au niveau des collectivités locales), ou certaines activités associatives. Autrement dit, si la société instaurait un nouveau droit, celui au revenu de base, ce n'est pas ce droit qui engendrerait la valeur correspondante à ce revenu. Celle-ci proviendrait obligatoirement du travail collectif et non d'une autre source miraculeuse illusoire (certains imaginent une vertu féconde des marchés financiers ou des rentes venues du fond des âges de l'humanité). Elle correspondrait donc à un transfert de la part des actifs vers les autres, ce qui suppose donc une validation collective. Raison de plus pour favoriser l'insertion de tous les individus dans toutes les sphères de la vie sociale et non pas accroître la fracture sociale.

    BENOIT THIEULIN :  J'aimerais tout d'abord souligner quel'option qui consiste à financer le revenu de base par la suppression des aides sociales conditionnelles, telles que les allocations familiales et les aides au logement ­ voire, pour certains modèles, les allocations chômage et le système d'assurance maladie ­, n'est pas l'unique possibilité. Sur ce sujet, le diable est, comme souvent, dans les détails, et le mode de financement en est un d'importance, dans la mesure où il modifie la portée politique du dispositif. À cet égard, vous n'ignorez pas que le revenu de base est porté par des courants politiques tout à fait différents pour des objectifs très divers, voire opposés. Des montants allant de 400 euros par personne jusqu'à quasiment 900 ou 1 000 euros sont proposés. Des refontes radicales du système fiscal ou même du système monétaire ont également été évoquées à l'appui de cette idée. La multiplicité des dispositifs et l'ampleur des sujets abordés révèlent que le revenu de base n'est pas une simple mesure technique de simplification ou de fluidification du marché du travail : il engage la nature profonde de nos systèmes économiques et sociaux ainsi que nos conceptions de ce que signifie l'activité productive. Il peut répondre à la transition numérique comme à l'émergence d'une économie qui ne soit pas uniquement marchande via le pair à pair ! Il peut être la première pierre pour rebâtir notre contrat social, adapté à la révolution numérique, et dessiner une nouvelle société plus collaborative et généreuse. En ce sens, il risque d'être un invité de choix lors des débats de l'élection présidentielle. Et je compte bien l'y pousser...

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  • Vendredi, 29 Janvier, 2016
    L'Humanité

    Manifestations samedi, pour dénoncer l'éventuelle prolongation de l'état d'exception. Ce même jour, la réflexion citoyenne sera également à l’honneur des débats de la deuxième Agora de l’Humanité, qui se penchera sur le sujet en s’interrogeant sur le thème « La citoyenneté menacée ? », à l’université Paris-VIII Saint-Denis.

    Apparu comme justifié au soir des attentats du 13 novembre, l’état d’urgence voit son efficacité contre le terrorisme contestée : les 3 189 perquisitions administratives et 392 assignations à résidence prononcées ont abouti à seulement quatre enquêtes sur des dossiers terroristes, et une seule mise en examen. Mais il se révèle être « un instrument très dangereux, qui peut facilement être retourné contre des opposants politiques », met en garde dans nos colonnes l’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic, qui plaide pour une synergie entre services de renseignements et judiciaires. Les abus et les injustices se multiplient, comme le rapporte dans son témoignage Mustapha F., assigné à résidence sans motif apparent depuis onze semaines.
     
    Pas question de céder au tournant sécuritaire impulsé par François Hollande et Manuel Valls pour des raisons de glissement idéologique autant que de calcul électoral, clameront les citoyens invités par une centaine d’associations à défiler, samedi, contre la tentation de prolonger l’état d’urgence et de le constitutionnaliser. Ce même jour, la réflexion citoyenne sera également à l’honneur des débats de la deuxième Agora de l’Humanité, qui se penchera sur le sujet en s’interrogeant sur le thème « La citoyenneté menacée ? », à l’université Paris-VIII Saint-Denis, avec les chercheurs Vanessa Codaccioni, Jean-Paul Jouary et Dominique Rousseau, et l’ancien ministre Anicet Le Pors. Lire la suite.
     

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  • Pi.M.
    Mercredi, 27 Janvier, 2016
    Humanite.fr

    Photo : AFP

    Le fabricant franco-italien de semi conducteurs STMicroelectronics (ST) a annoncé ce mercredi matin la fin de son activité ce construction et développement de décodeurs numériques. Cela se traduit par 1400 suppressions de postes, une erreur stratégique et un véritable manque de vision industrielle.

    "La société a annoncé (...) un réalignement global des effectifs qui pourrait affecter environ 1.400 salariés dans le monde, dont environ 430 en France via un plan de départs volontaires, environ 670 en Asie et environ 120 aux Etats-Unis", a écrit STMicroelectronics dans son communiqué matinal. Une mesure mise en place dès cette année, avec 1100 postes dont 150 en France supprimés. L’entreprise prévoit un coût du plan social d’environ 170 millions d’euros par an. 800 salariés travaillent sur ce secteur du décodeur numérique en France, la majorité à Grenoble, le reste à Paris et Le Mans.

    Les syndicats s’en doutaient. Ils avaient une nouvelle fois interpellé les pouvoirs publics la semaine dernière, c’est que les Etats français et italien détiennent chacun 13,77% du capital de ST, unique fleuron européen dans le domaine…

    La CGT estime pourtant que le secteur des décodeurs numérique restait porteur. « Nous constatons que les efforts faits pour redresser les décodeurs commencent à porter des fruits en termes techniques et commerciaux, expliquait le syndicat à Emmanuel Macron. Outre les perspectives commerciales propres à ce secteur, c’est celui qui est aujourd’hui le plus avancé dans ST, car on y maîtrise à la fois le matériel et le logiciel. » C’est une amputation stratégique, dramatique sur le long terme. « Le tuer aboutirait à priver ST d’une expérience et de compétences qui seront progressivement utiles à tous les secteurs. Que l’on sache, l’évolution va vers plus de complexité, plus de compétences systèmes et non l’inverse ! » déplore la CGT.

    A l’heure où le gouvernement français veut miser sur les nouvelles technologies pour se développer, amputer STMicroelectronics relève d’un vrai manque de vision industriel. D’autant plus que si les résultats sont légèrement en baisse, le groupe reste solidement bénéficiaire, d’environ 100 millions d’euros pour 2015…

    • Mise à jour. Comme souvent lors d'une annonce de plan social, la bourse est en joie. Les actionnaires sont rassurés : on ne touchera pas à leurs dividendes. L'action de STMicroelectronics connait ainsi une forte hausse avec +3,49% à la mi-journée...

    La CGT : "Les salariés sont en attente d’une nouvelle vision industrielle et de mesures concrètes comme l’arrêt de la distribution des dividendes, mesure nécessaire pour dégager des moyens et réinvestir.  Le changement d’équipe dirigeante est indispensable pour porter une stratégie aussi nouvelle. À commencer, pour être crédible vis à vis des salariés, qui sont à la base de toute production de richesse. Mais aussi vis-à-vis des clients hésitant sur l’engagement de long terme avec une entreprise ainsi dirigée."

    STMicroelectronics: un véritable "gâchis économique et humain" | L'Humanité


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  • Thomas Lemahieu
    Vendredi, 29 Janvier, 2016
    L'Humanité
    La Grèce a vu débarquer sur ses côtes plus d’un million de réfugiés en 2015 et près de 70 000 depuis le début de cette année. l’île grecque de Lesbos, le 15 décembre 2015.

    La Commission européenne exige du gouvernement Tsipras qu’il protège mieux la « frontière extérieure » de l’Europe. Faute de quoi, le pays pourrait être exclu de l’espace Schengen et transformé de facto en camp de rétention pour les réfugiés qui arrivent par ses îles.

    À la Grèce, décidément, rien ne sera épargné. Après le chantage à l’expulsion de la zone euro, voici celui à l’exclusion de l’espace Schengen. « Depuis novembre, la Grèce a commencé à travailler pour respecter les règles de Schengen, mais il est nécessaire qu’elle fasse plus encore », tance Valdis Dombrovskis, le vice-président de la Commission européenne. Même registre, diktats identiques, rhétorique similaire : qu’importent les faucons — Wolfgang Schaüble ou les dirigeants de droite populiste et xénophobe à l’Est —, pourvu qu’on casse la Grèce ! La nature et l’ampleur sans précédent des crises — le fardeau d’une dette publique odieuse et illégitime, ou encore les flux de réfugiés fuyant les guerres en Afrique et au Proche-Orient — ne sont jamais prises en compte. Il n’y a qu’un mot d’ordre, répété à l’envi : « Jamais assez, toujours plus ! »

    Des plans sont déjà en préparation

    Un nouveau cap a été franchi, mercredi, avec un ultimatum lancé à la Grèce : si, dans les trois mois, les institutions européennes considèrent que le pays ne protège pas mieux la « frontière extérieure » de l’Union européenne, il sera sorti de Schengen et cette « frontière extérieure » se verra déplacée plus au nord.

    Derrière la désignation d’un bouc émissaire commode, la procédure qui, ouverte par la Commission, devra être approuvée à la majorité qualifiée au Conseil européen, sert d’abord à entériner les décisions unilatérales des États qui ont d’ores et déjà fermé leurs frontières et qui, désormais, multiplient les mesures inhumaines contre les migrants. « Si nous ne pouvons pas protéger la frontière extérieure de l’UE, la frontière gréco-turque, alors la frontière extérieure de Schengen sera déplacée vers l’Europe centrale », avertit la ministre autrichienne de l’Intérieur, Johanna Mikl-Leitner.

    Des plans pour aller dans ce sens sont déjà en préparation. La Slovénie a, par exemple, proposé que les États membres et les institutions européennes participent au « renforcement » de la frontière avec la Macédoine, qui ne fait pas partie de l’espace Schengen et n’est pas membre de l’Union européenne. Dans sa réponse au premier ministre slovène, Jean-Claude Juncker, le président de la Commission, appuie l’idée.

    La Grèce a vu débarquer sur ses côtes plus d’un million de réfugiés en 2015 et, malgré les conditions plus difficiles en hiver, près de 70 000 depuis le début de cette année.

    Et l’Union européenne, prise en faute sur les politiques d’accueil — sur les 160 000 installations de demandeurs d’asile réparties entre les différents pays, quelques centaines seulement sont effectives —, en échec également face à la Turquie à qui elle a promis 3 milliards d’euros pour « contenir » les réfugiés, paraît ne plus imaginer que leur couper la route au-delà de la Grèce. « Chercher à nous isoler n’est pas constructif, estime en langage diplomatique Olga Gerovassili, la porte-parole du gouvernement grec. La tactique de se renvoyer les responsabilités ne constitue pas une gestion efficace d’un problème de dimension historique, qui réclame une action commune. » Selon son collègue Ioannis Mouzalas, ministre délégué grec aux politiques migratoires, « Schengen est menacé dans toute l’Europe, l’Europe est en danger, l’Europe a peur ». En d’autres termes, ce n’est pas en isolant la Grèce et en la transformant, comme l’a suggéré le Financial Times par exemple, en gigantesque camp de rétention à ciel ouvert contre une promesse d’allègement de la dette, que la situation risque de s’améliorer. « On ne va pas transformer notre pays en une espèce d’Ellis Island de l’Europe », insiste le ministre dans une référence à l’île qui servit, pendant la première moitié du XXe siècle, à trier les migrants vers les États-Unis.

    Alors qu’hier matin, au large de l’île de Samos en mer Égée, les corps de treize migrants, dont huit enfants, ont été repêchés par les garde-côtes grecs, le gouvernement Tsipras entend préserver, contre vents et marées, une vocation ouverte et généreuse pour l’Europe.

    « Ces derniers jours, des milieux européens extrêmement conservateurs s’efforcent de stigmatiser la Grèce en la présentant comme la source du problème des réfugiés, dénonce Nikos Xydakis, ministre grec des Affaires européennes. La pression exercée sur la Grèce pour changer les conditions de contrôle en mer Égée risque d’accroître le nombre de décès, déjà élevé. Par conséquent, quiconque demande une telle chose devrait avoir l’honnêteté politique de le demander directement, et non de manière détournée, cautionnant ainsi la politique illégale du refoulement. »

    Après l’euro, un nouveau chantage infligé à la Grèce | L'Humanité


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