• <details class="signature" open=""> <summary></summary> Paule Masson / Editorial de l'Humanité du 08/01/2016 </details>

     

    Assignes a resistance

    La République dénaturée ! | L'Humanité

    <section>

    François Hollande prononçait hier des voeux de « fermeté, réactivité, unité » aux forces de police au moment même ou un kamikaze armé d'un couteau forçait la porte du commissariat du 18e arrondissement de Paris et était abattu.

    Un an jour pour jour après l'attentat contre Charlie Hebdo, la conjonction des deux événements a offert un condensé du climat d'anxiété qui alimente à la fois le ressort de la peur et l'engrenage des réponses sécuritaires.

    « La haine, c'est l'hiver du coeur », disait Victor Hugo. Le terrorisme s'en nourrit. Il ne craint pas l'escalade mais la démocratie. L'exécutif martèle que nous sommes « en guerre » et justifie la mise en place d'un arsenal inédit de mesures répressives au nom de la République. Pauvre République, si généreusement née en 1792, si sévèrement dénaturée aujourd'hui ! Cette année 2015 l'aura balafrée de toute part, dans un retournement de valeurs assez édifiant : l'ordre contre la démocratie, la police contre la justice, l'état d'urgence contre la liberté, le rejet de l'autre contre la fraternité.

    L'idée de République rassure parce qu'elle incarne dans notre imaginaire collectif une idée très positive du vivre-ensemble.

    Mais trois décennies de démissions face aux inégalités, aux discriminations, à la précarité, à l'assèchement des services publics lui ont fait perdre beaucoup de crédibilité. Les frères Kouachi, Amedy Coulibaly et plusieurs des tueurs du 13 novembre étaient des enfants de France.

    On peut, comme ne cesse de le faire Manuel Valls, couper court au débat sur les causes en rejetant sur eux la faute de leur basculement. Heureusement, la plupart des personnes que la société a laissées sur le bord de la route ne deviennent pas des terroristes.

    Mais si la République est encore notre bien commun, alors, le débat doit s'ouvrir sur son avenir et les valeurs qui la façonnent, même quand un danger menace. Le chantier est immense mais celui-là, au moins, en appelle à l'intelligence citoyenne, à une refondation de la politique et reprend langue avec l'espoir.

    </section>

    votre commentaire
  • COURAGE ! ...L’année 2015 a été marquée contradictoirement par la réappropriation par les citoyens des symboles de la République pour défendre la liberté, et la dérive sécuritaire du pouvoir menée en son nom, avec le projet de constitutionnaliser l’état d’urgence et la déchéance de nationalité.

     

    Sébastien Crépel  / Jeudi, 7 Janvier, 2016 / L'Humanité

     

    Quand retentissent les coups de feu dans les locaux de Charlie Hebdo, au matin du 7 janvier 2015, les Français ne savent pas encore que l’année qui commence sera placée sous le signe d’un double phénomène. Celui des retrouvailles de tout un peuple célébrant la liberté face à l’intolérance qui culmineront après les attentats du 13 novembre.

    COURAGE ! ... fuyonsEt celui d’une dérive sécuritaire du pouvoir inégalée jusqu’alors, porteuse de dangers liberticides avec le projet de constitutionnaliser l’état d’urgence, et de germes d’intolérance avec celui d’y adjoindre la possibilité de déchoir de leur nationalité française tous les binationaux, ce qui entérinerait l’existence de deux catégories de Français.

    Le point commun de ce mouvement contradictoire : l’invocation, dans un cas comme dans l’autre, de la nécessité de défendre la République et ses « valeurs », pour vaincre la peur et le risque du repli sur soi d’un côté, pour faire « la guerre contre le terrorisme » de l’autre, une expression ressassée dans une véritable opération de communication et de propagande du gouvernement.

    Derrière l’unité, une République qui montre ses fractures...

    Lire la suite : Depuis Charlie, la République a vécu le meilleur comme le pire | L'Humanité

    Ou bien en PDF : Depuis Charlie la République, le meilleur et surtout le pire


     


    votre commentaire
  • Jusqu’où iront-ils ? Voilà qu’un nouveau projet de loi de réforme pénale vient d’être transmis au Conseil d’Etat. Débordant le champ ouvert par la révision de la Constitution et la déchéance de nationalité, il est un pas de plus, mais décisif vers l’instauration d’un Etat de police et de suspicion.

    etat-d-urgence-prolonge-de-trois-mois-et-renforce

    DESSIN : État d'urgence : prolongé de trois mois et renforcé - France - Le Télégramme, quotidien de la Bretagne

    Depuis la remise à flot de l’état d’urgence, de nombreuses libertés publiques (de la liberté d’association à la liberté de circulation, en passant par la sûreté du domicile et des personnes) ont été rognées. Le juge a tout simplement été écarté au profit du pouvoir discrétionnaire de l’Exécutif, de ses préfets et de ses gendarmes. Le gouvernement semble se rendre à l’évidence : à la date du 26 février, il apparaitra improbable d’annoncer la fin de l’état d’urgence (justifié par la "guerre contre l'armée djihadiste") au vu des seuls résultats de ces trois derniers mois. Et demander sa prolongation au Parlement, à quelques encablures de la réunion du Congrès pour la révision constitutionnelle, peut apparaître comme politiquement coûteux.

    La démarche est donc d’alourdir encore un peu plus le dispositif législatif des pouvoirs donnés à la police et à l’administration : armement des policiers et des gendarmes bénéficiant de l’irresponsabilité pénale, fouilles discrétionnaires des bagages et des véhicules après celles des domiciles, contrôle administratif strict des personnes « soupçonnées de pouvoir se rendre sur un théâtre d’opérations »…Tout cela à l’abri du contrôle d’un juge. Bref, il s'agit de prolonger l'état d'urgence sans les quelques contraintes de l'état d'urgence.

    Le plus grave n’est peut-être pas cette liste qui s’allonge au fil des lois de circonstances (de novembre 2014, juillet 2015, octobre 2015) votées par la gauche,  mais le renversement de logique pénale sur laquelle repose cette politique.

    Depuis la loi sur la rétention de sûreté du 25 février 2008, on instaure silencieusement en France une justice prédictive, fondée sur la suspicion et le pronostic, et non plus sur des preuves et des faits. Ainsi la loi du 20 novembre 2015 sur l’état d’urgence a-t-elle modifiée la loi de 1955 sur l’assignation à résidence ou les perquisitions en l’appliquant à toute personne vis-à-vis desquelles il existe « des raisons de penser que son comportement (et non plus seulement son activité) constitue une menace ». 

    L’idée est que « l’Autre » (pour l’instant le musulman mais pas seulement) est dangereux en tant que tel, dès lors qu’on peut avoir quelque doute sur ses intentions, et  quand bien même il n’aurait pas fait montre de la moindre tentative délictueuse ou criminelle.

    Ainsi la notion d’ « entreprise individuelle à caractère terroriste » énoncée par la loi de 2014 est-elle particulièrement vague en visant des comportements éloignés de la moindre infraction. Les soi-disant « bavures » recensées au gré de l’application de la loi du 20 novembre sont des illustrations de cette dérive entrée dans les mœurs policières et administratives. 

    Cette transformation du « droit des gens » est non seulement absolument contraire aux principes fondamentaux de la République mais à toute la tradition du droit français. Que ce soit un pouvoir issu d’un vote majoritaire de gauche qui y procède est proprement criminel car il bricole un régime d’exception destiné à durer dans les institutions qui peuvent tomber dans des mains illibérales.

    François Hollande et Manuel Valls sont en train de ruiner l'Etat de droit démocratique.

    Ils escomptent peut-être que le bruit fait autour de la déchéance de nationalité couvrira la petite musique de leurs mesures de basse police. Ils pensent sans doute que l’arbre de la révision constitutionnelle cachera leur misérable manœuvre législative. Il faut secouer les consciences pour  empêcher l'avènement de leur Etat de police et de suspicion.


    votre commentaire
  • Les classes sociales, enterrées trop vite, continuent de structurer la société française. Refuser de le voir conduit au ras-le-bol social et au vote extrême.

    Des revenus à l’éducation, en passant par le logement ou la santé, les inégalités entre classes sociales perpétuent un système de domination qui se reproduit systématiquement.

    cachez cette lutte des classes

    Source : Les classes sociales sont de retour ! http://www.inegalites.fr/ (SYNTHESE)

    Synthèse d’analyses de Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités :

    l’analyse des rapports de classe passe, certes, par une prise en compte des politiques en faveur de ceux qui possèdent moyens de production et capital financier (lire 2016 verra une intensification de la lutte de classe). Mais il est nécessaire d’aller beaucoup plus finement dans l’analyse des classes sociales. Comme le sociologue BOURDIEU, il pense que la reproduction des rapports de domination est fondée sur le capital économique, mais aussi sur une forme de capital culturel, et sur un capital social dont les effets sont de plus en plus marqués. Il refuse cependant "l’application dogmatique de l’analyse d’inspiration marxiste et des thèses de Pierre Bourdieu" [13]

    Il est important que nous prenions conscience de cette réalité pour comprendre le divorce profond que nous constatons entre nos actions, nos propositions, et les réactions et les votes des classes populaires.

    Après le ras-le-bol fiscal, place au ras-le-bol social des classes laborieuses.

    Les élections régionales ont été le théâtre de l’expression d’une exaspération des milieux populaires.Hausse de la pauvreté, inégalités scolaires, sur-chômage des ouvriers non qualifiés, inégalités d’accès aux soins, etc.

    A peine leur enterrement terminé, les classes sociales ressuscitent dans le débat public. Sous des appellations parfois différentes, « milieux », « couches » ou « catégories » sociales (vaine bataille des mots), un ensemble de données montre le poids de l’origine sociale (lire l’article Portrait social des classes) : http://www.inegalites.fr/spip.php?page=analyse&id_article=2109&id_rubrique=207&id_mot=28

    Salaires, niveaux de revenus, pratiques de loisirs, etc. : notre société demeure structurée par les écarts qui existent entre milieux sociaux. La « moyennisation » - mise en exergue dans les années 1990 et 2000 - a fait long feu. Le revenu, le diplôme, la profession ou l’histoire familiale continuent de façonner les pratiques.

    Le premier clivage qui sépare les catégories sociales est leniveau de vie.

    Avec un salaire mensuel net moyen de 4 072 euros en 2013, les cadres supérieurs touchent 2,4 fois plus que les ouvriers (1 686 euros). On ne mesure pas toujours très clairement l’ampleur d’un tel écart : chaque mois, les premiers peuvent dépenser ou épargner 2 386 euros de plus que les seconds, soit près de deux mois de travail d’un smicard (le Smic mensuel brut se monte actuellement à 1457.52 euros).

    Ces inégalités deniveaux de viese retrouvent, en version amplifiée, en matière de patrimoine.La fortune médiane (la moitié possède plus, l’autre possède moins) d’un cadre supérieur est de 214 500 euros, contre 5 500 euros pour un ouvrier non qualifié. Près de 40 fois moins.

    Les écarts ne sont pas moins importants dans le domaine scolaire,même si les jeunes issus des couches sociales les moins favorisées obtiennent plus souvent le baccalauréat aujourd’hui qu’hier. Un enfant de cadre supérieur a deux fois plus de chances que celui d’un ouvrier d’obtenir un bac général et quinze fois plus de décrocher un bac S (données 2002). Dans les filières les plus sélectives d’un système adepte du tri social, les enfants des classes populaires sont très rarement représentés.

    Les mondes professionnels des cadres et des ouvriers n’ont rien à voir entre eux.Le taux de chômage des premiers est resté insensible à la crise, alors que celui des ouvriers non qualifiés atteint 20 %. En 2013, six fois plus d’ouvriers que de cadres travaillent dans des conditions pénibles (respirer des fumées ou des poussières par exemple). A 35 ans, un ouvrier a une espérance de vie de 40,9 ans contre 47,2 ans pour un cadre supérieur, soit 6,3 ans de plus.

    Les conditions de vie des cadres et des ouvriers sont également le reflet des inégalités entre milieux sociaux.20 % des ouvriers vivent dans un logement inconfortable (de qualité médiocre ou surpeuplé) en France, contre 8 % des cadres. 47 % des ouvriers partent en vacances contre 82 % des cadres, soit près de deux fois plus.

    Les pratiques culturelles se sont diffusées au cours des trente dernières années mais les inégalités d’accès à la culture restent présentes :les cadres sont ainsi trois fois moins nombreux que les ouvriers à n’avoir pas lu de livre dans une année.

    Finalement, hormis dans les petites classes à l’école ou dans la rue, ces milieux ont peu de lieux où ils se croisent. Et logiquement, ils ne se mélangent pratiquement pas : seuls 3,4 % de cadres supérieurs sont mariés avec une ouvrière, et 2,2 % d’ouvriers vivent avec une femme cadre supérieur.

    Faute de prendre en compte cette situation, l’action publique attise les tensions.

    On les avait oubliées ces classes sociales. Haro sur quiconque cherche les causes sociales de nos difficultés[2]. Comme l’a affirmé récemment le premier ministre.Celui qui cherche une explication sociologique donne, d’après VALLS, des excuses aux terroristes, aux immigrés délinquants, à la racaille des cités [3].

    Ce qui préoccupe les intellectuels médiatiques, les politiques au pouvoir, c’est l’ « insécurité culturelle » [4] . La peur supposée des blancs des catégories populaires devant l’invasion d’immigrés, qui tenteraient d’imposer leur culture. Le temps du « grand remplacement » serait venu.Les intellectuels médiatiques sont ceux que Daniel Bensaïd appelait les « caniches de garde » …(Ce qui n’est pas gentil pour les caniches). Du type de Jacques Attali, Luc Ferry, Alain Finkielkrautet Bernard-Henri Lévy, ou encore Zemmour … Vous ajouterez qui vous voudrez !

    Les classes changent

    Beaucoup de raisons expliquent cette mise sur la touche de l’analyse de la structure sociale [5]. Le paysage des professions a évolué par le biais des évolutions de l’emploi, qu’il s’agisse des transformations des secteurs économiques ou des modes de production. Depuis le début des années 1980, la part des ouvriers a décliné de 32 à 22 % et celle des employés a progressé de 26 à 29 %, selon l’Insee. Dans le même temps, la part des professions intermédiaires et celle des cadres supérieurs s’est nettement accrue (respectivement + 4 points et + 9 points sur la période), traduisant une qualification croissante des postes de travail : ni moyennisation, ni disparition des classes moyennes, mais un vrai changement.

    Les organisations qui représentaient la classe ouvrière traditionnelle, le Parti communiste et les syndicats, ont vu fondre leurs bataillons. 8 % des salariés adhèrent désormais à un syndicat, à peine 5 % dans le seul secteur privé. Dans les PME, les syndicats ont quasiment disparu. Faute d’unité et de représentants, on a considéré que les exécutants n’existaient plus.

    Il fallait être aveugle pour ne pas voir que ceux-ci ne faisaient que changer de visage, comme continuaient d’ailleurs à le montrer quelques rares ouvrages. Parmi lesquels on peut citer « La misère du monde », Pierre Bourdieu, Le Seuil, 1993 ou « La France invisible », Stéphane Beaud, La Découverte, 2008[6].

    Une grande partie des exécutants de l’industrie ont été remplacés par des postes qui ne le sont pas moins dans le secteur des services, plus souvent occupés par des femmes ou des jeunes non qualifiés.Des hypermarchés aux centres d’appels, en passant par le nettoyage ou les assistantes maternelles, une main d’œuvre peu qualifiée est au service du reste de la société. Si les classes sociales sont périmées, comment expliquer que 15 % des enfants d’ouvriers non qualifiés figurent parmi les plus faibles au CP, contre cinq fois moins d’enfants de cadres ? (lire notre article Pourquoi les enfants d’ouvriers réussissent moins bien à l’école que ceux des cadres ?). Ces enfants sont-ils moins travailleurs ou moins intelligents ? Comment comprendre qu’en grande section de maternelle, les enfants des premiers ont trois fois plus souvent des dents cariées ? (Préparation de la catégorie des sans-dents chère à François Hollande) …

    D’autres facteurs ont joué. Dans un monde à 90 % salarié, le critère de classe, s’il reste figé à des temps antérieurs ne permet plus de comprendre les transformations sociales et les processus de domination. Au nom des classes, on a longtemps négligé les autres critères structurants des inégalités que sont le genre, le territoire, l’âge ou la couleur de la peau, l’origine, qui occupent aujourd’hui le terrain. Un ouvrier, c’était un ouvrier, peu importe qu’il soit noir, jeune, homosexuel(le) ou ouvrière.

    Comme l’explique Janine Mossuz-Lavau dans un ouvrage récent : « lutte des classes, pauvres et riches, ouvriers et patrons, ont fait les beaux jours de ceux et celles qui analysaient notre société (…) reléguant plus bas celles résultant d’autres caractéristiques » : (Préface de « L’égalité sous conditions », Réjane Sénac, Presses de Sciences Po, 2015.[7]). On en connaît aujourd’hui le retour de bâton.

    Classe, groupe ou milieu ? La vaine bataille des mots

    Dès les années 1980, on a annoncé (de façon exotique) le temps des « tribus » [10], communautés façonnées par les « goûts ». De façon plus sérieuse, une partie des sociologues décrivant les transformations des années 1970 et 1980 ont cru à la « moyennisation » de la société et à la fin des conflits de classe.

    Cela n’a rien d’étonnant : à partir des années 1980, la théorie économique dite néoclassique (ou néolibéralisme) [12] triomphe face au modèle keynésien dominant alors. Les politiques économiques de relance nationales se brisent sur l’internationalisation des échanges.

    Une partie de l’analyse de la société contemporaine s’est médiatiquement déplacée loin des terrains de l’expertise des données sociologiques, à travers les enquêtes journalistiques de terrain et surtout l’utilisation forcenée de sondages censés représenter les valeurs de l’ « opinion ». Les nouveaux lieux de pensée que sont les « think-tank » dissèquent ce type d’enquêtes médiatiquement porteuses, bien plus qu’elles n’analysent l’évolution des catégories socioprofessionnelles. (Voir parmi les dernières livraisons « Karim vote à gauche et son voisin vote FN », Gilles Finchlestein et Jérôme Fourquet, Fondation Jean Jaurès, novembre 2015)[14].

    L’évolution du personnel politique - militants et élus - a aussi joué. Le nombre d’adhérents des partis a fortement décliné à partir des années 1980.

    Ils sont quasiment exclusivement composés de militants issus des catégories les plus favorisées (le plus souvent du secteur public), toujours plus nombreuses lorsque l’on s’élève dans la hiérarchie des fonctions. Ces partis de notables défendent les préoccupations de leurs militants [15]. La plupart des élus et des membres de l’exécutif de la nation ont une vision lointaine de la société et des rapports de classe, s’intéressent peu aux catégories populaires. Les élus locaux n’ont qu’un rôle marginal dans la formulation des programmes et l’élaboration des politiques.

    D’un point de vue idéologique, l’expérience des dictatures menées au nom de prolétariat et de la lutte des classes, devenues des dictatures tout court, a servi de repoussoir.La thématique n’est pourtant pas absente des discours, comme celui de Jacques Chirac en 1995 autour de la fracture sociale, de François Hollande en 2012 avec les inégalités ou en janvier 2015 avec « l’apartheid social » dénoncé par Manuel Valls.

    Des discours et des programmes qui s’éteignent rapidement avec l’exercice du pouvoir. Face à ce qui a tout d’une tromperie sur la marchandise, il est logique que les milieux populaires boudent les urnes ou expriment un fort mécontentement, comme l’ont analysé récemment Thomas Amadieu et Nicolas Framont [16].

    Louis Maurin

    DESSIN :Cachez cette lutte des classes que je ne saurais voir - Le blog de Fañch

    Notes

    [1] « Le nouvel âge des inégalités », Jean-Paul Fitoussi et Pierre Rosanvallon, le Seuil, 1996.

    [2] « Malaise dans l’inculture », Philippe Val, Grasset, 2015.

    [3] Voir : « Pour la sociologie. Et pour en finir avec la prétendue « culture de l’excuse » », Bernard Lahire, La Découverte, à paraître.

    [4] « L’insécurité culturelle », Laurent Bouvet, Fayard, 2015.

    [5] Le lecteur trouvera une analyse beaucoup plus fouillée dans « Sociétés sans classes ou sans discours de classe ? », Claude Dubar, Lien social et politiques, n°49, printemps 2003.

    [6] Parmi lesquels on peut citer « La misère du monde », Pierre Bourdieu, Le Seuil, 1993 ou « La France invisible », Stéphane Beaud, La Découverte, 2008.

    [7] Préface de « L’égalité sous conditions », Réjane Sénac, Presses de Sciences Po, 2015.

    [8] « La gauche et les classes sociales : de l’éclipse au renouveau », Stéphane Beaud, Mouvements, n°50, 2007/2.

    [9] Et très marginaux étaient les sociologues qui annonçaient « Le retour des classes sociales », Louis Chauvel, revue de l’OFCE, n°79, 2001.

    [10] « Le temps des tribus  », Michel Maffesoli, Méridiens-Klincksieck, 1988.

    [11] « La seconde révolution française », Henri Mendras, Gallimard, 1988.

    [12] Théorie néoclassique : qui cherche l’explication des mécanismes économiques dans la rationalité individuelle des acteurs.

    [13] Voir « La sociologie selon Bourdieu  », Louis Maurin, Alternatives économiques n°201, mars 2002.

    [14] Voir parmi les dernières livraisons « Karim vote à gauche et son voisin vote FN », Gilles Finchlestein et Jérôme Fourquet, Fondation Jean Jaurès, novembre 2015.

    [15] De façon très significative, on lira les programmes des « universités d’été » et la place prise par les questions sociales.

    [16] « Les citoyens ont de bonnes raisons de ne pas voter », Nicolas Framont et Thomas Amadieu, Le bord de l’eau, 2015

    Date de rédaction le 7 décembre 2015

    Dernière révision le 17 décembre 2015


    votre commentaire
  • 2016 verra une intensification de la lutte de classe. Les conflits de classe vont devenir une caractéristique de plus en plus dominante de la vie en 2016 à mesure que les classes dirigeantes aux États-Unis et partout dans le monde exigent que les travailleurs paient pour la crise économique mondiale et le coût des guerres sans fin qui s’étendent selon Jerry White.

    Lutte de classe

    Lire la suite : 2016 verra une intensification de la lutte de classe - Sans langue de bois

    Par Gerard Karageorgis

    Conclusion de ce long article très argumenté :

    LA LUTTE DES CLASSES, C’EST DÉPASSÉE QU’ILS DISENT !

    Ce gouvernement, comme le précédent et les autres avant lui, déverse dans un puit sans fond des aides, des subventions, des allégements d’impôts, des …, enfin bref, des cadeaux sans contrepartie à une petite clique de privilégiés qui ruinent la France. Depuis des années on nous fait croire que ces milliards doivent « inciter » le patronat à investir et à embaucher, mais depuis des années, les grandes entreprises, celles qui exportent et qui n’ont que le mot « compétitivité » à la bouche, dépensent plus en dividendes reversés qu’elles n’investissent !

    « Choc », « pacte », « compétitivité », « confiance »…,  ces mots tournent en boucle, du patronat au gouvernement, en passant par les « économistes ». Après traduction, il faut comprendre que les salariés dans ce pays sont trop payés, ne travaillent pas assez et profitent indûment d’une des meilleures protections sociales encore existantes en Europe. S’il y a du chômage, des licenciements, des fermetures d’entreprises, des suppressions d’emplois, ne cherchez plus, c’est parce qu’on n’est pas assez « compétitifs », et les français sont des fainéants !

    Et Hollande avec son gouvernement, en signant le nouvel accord de « responsabilité », ne se cache même plus de rouler pour le Medef. Il réalise les souhaits du patronat en annonçant la fin des cotisations familiales, ce qui représente un cadeau de 35 milliards et une attaque sans précédent contre la sécurité sociale et toute la branche famille ! Le tout sans rien demander en échange, car les modalités qui contraindraient le patronat à une contrepartie ne sont pas encore établies, on fait des cadeaux et ensuite on verra si ces messieurs du CAC40 veulent bien faire un geste !

    Depuis déjà 30 ans on sait pertinemment que les diminutions d’impôt, de cotisations et tout autre cadeau aux entreprises n’ont pas créé un seul emploi. Plus on allège le prétendu « coût du travail », et plus on crée du chômage, chercher l’erreur ! Et Gattaz le président du Medef réclame maintenant 100 milliards d’allègements supplémentaires !

    Alors ceux qui pensent que la lutte des classes c’est dépassé, doivent se rendre compte que pour les plus riches elle n’a jamais été autant d’actualité, mais que contrairement aux classes populaires, les plus riches se battent avec vigueur et acharnement. Si les salariés ont baissé les bras ce n’est pas le cas de ceux qui les exploitent !

    Les exonérations de cotisations sociales pour le patronat ouvrent la voie à un véritable hold-up sur la partie de nos salaires versée directement par les employeurs, pour assurer à chacun des services sociaux de qualité.Et l’on voudrait nous faire avaler cela au nom d’un prétendu «pacte social» et de la «solidarité nationale» ou même de«patriotisme», un vocabulaire qui rappelle le temps des guerres, et c’est en l’occurrence une vraie guerre sociale qui est ainsi lancée contre les classes populaires. Les couches populaires sont attaquées sur trois fronts : les dépenses quotidiennes, la protection sociale et l’accès aux services publics. Le changement promis par Hollande, c’est en pire !

    La réduction des dépenses publiques  va encore dégrader les hôpitaux, l’Éducation, les transports, et priver les collectivités de ressources indispensables pour la population. Il n’aura pas fallu longtemps pour que le gouvernement socialiste montre à quel point il est prêt à s’aplatir face au patronat, et est capable des pires attaques contre les travailleurs.

    La logique du système capitaliste est qu’il faut financer l’investissement du privé de façon prioritaire, mais au détriment de l’investissement public.D’une part, on fait l’impasse complète sur le coût du capital et les prélèvements financiers des entreprises, c’est-à-dire les intérêts et les dividendes aux actionnaires. D’autre part, pourquoi ces mesures concernent-t-elles toutes les entreprises, alors que logiquement la compétitivité ne concerne que celles qui sont impactées par la mondialisation ? L’on peut craindre que les cadeaux faits aux sociétés ne servent une nouvelle fois qu’à la distribution de dividendes et non  à l’investissement, et encore moins à l’emploi !


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique