-
Par rozalux le 19 Novembre 2015 à 16:53
Nous venons de recevoir l'information de la préfecture de police de Paris qui nous indique que les mobilisations citoyennes prévues pendant la cop sont interdites à Paris.
Cela concerne notamment la Marche mondiale pour le climat du 29 novembre ainsi que les mobilisations de la fin, la grande action des Amis de la Terre "People power action" du 11 décembre et les mobilisations prévues le 12 décembre.
Nous vous appelons donc à signer et à faire signer largement cet appel car cette situation n'est pas soutenable au regard de l'urgence de la situation climatique.
Les Amis de la Terre France.
Construisons un monde juste, durable et solidaireLes peuples de Paris et Beyrouth ont vécu des massacres ignobles. Nous exprimons notre tristesse et notre solidarité avec toutes les victimes ainsi que notre détermination à nous tenir debout face au meurtre programmé et aléatoire de civils innocents.
Qu'ont voulu les terroristes ? Nous faire peur et nous pousser à des réactions aveugles et brutales qui intensifieraient le cycle de la violence. Daesh nous a frappé dans nos lieux de rencontre, de vie, pour nous terroriser, engendrer chez nous des désirs de vengeance, de violence, et nous attirer à notre tour vers la haine. Ils veulent nous faire entrer dans leur jeu sanglant, leur logique de guerre.
Nous sommes tous visés mais nous n'avons pas peur. Nous ne cédons pas à l'angoisse, tout comme nous n'acceptons pas la "stratégie du choc", qui profite des catastrophes humaines, sociales ou environnementales pour enclencher toutes les régressions, les restrictions des libertés élémentaires et les formes de repli sur soi. Nous appelons à répondre à ces crimes par plus de justice, plus de solidarité, plus de détermination à lutter contre tout ce qui nous empêche de faire ensemble société.
Nous affirmons notre unité et notre soif de vivre ensemble. Nous considérons indispensable de nous attaquer aux causes profondes : injustice, misère, guerre, inégalité, racisme, intolérance, violations des droits de l'humanité, saccage écologique et dérèglement climatique.
Nous soutenons les grandes mobilisations citoyennes qui se dérouleront à Paris à l'occasion de la COP21, tels que la marche pour le Climat du 29 novembre, le Sommet Citoyen pour le Climat dont le Village Mondial des Alternatives du 5 et 6 décembre, et la mobilisation du 12 décembre. Elles sont un moyen essentiel pour inverser le cours des choses et de vaincre le fatalisme. Elles démontrent qu'un autre monde est en train de voir le jour. Une dynamique dont les forces, constituées de citoyen-ne-s du monde entier, agissent pour préserver nos biens communs, et construire un monde plus juste, durable et solidaire. Elles travaillent à ce que nous avons en partage et qui nous relie.
votre commentaire -
Par rozalux le 17 Novembre 2015 à 10:20
>>Parce qu’à 6 heures du matin on apprend les terribles évènements qui ont frappé Paris et la décision présidentielle de décréter un état d’urgence,
Parce qu’à cette heure matinale nous ignorons encore si la mairie de Vénissieux va interdire ou non notre manifestation,
>> Parce qu’il nous faut alors répondre rapidement à ceux qui doivent venir et ne sont pas encore partis de chez eux, sans savoir non plus si les trains fonctionnent,
>> Parce que nous nous inscrivons dans le temps long de la réflexion et que nous sommes télescopés par le temps court de l’émotion,
>> Parce que c’est un temps de deuil et quoi qu’on puisse penser de la situation et de ses causes, il faut le respecter ou renier notre part d’humanité,
>> Parce que, continuer comme si de rien n’était, nous rabaisserait à cette civilisation hors sol ancrée dans une réalité virtuelle que nous contestons,Nous avons décidé d’annuler le Contre-sommet.
Nous avons travaillé plusieurs mois pour vous offrir ce temps de réflexion, comme les intervenants programmés. Qu’on le veuille ou non, ouvrir les portes ce matin c’était faire entrer une émotion sans rapport avec notre objet. Emotion assez forte pour parasiter tant la parole des intervenants que l’écoute des participants Et c’est bien ainsi d’ailleurs que nombre d’entre vous ont réagi à l’annonce de l’annulation, nous disant vouloir échanger et partager, réaction naturelle devant ce flux d’émotion et la frustration de ne pouvoir vivre l’évènement prévu.
Si pour nous l’annulation était une évidence, le seul facteur qui nous faisait fléchir c’était vous. Vous tous qui avez traversé la France, fait des sacrifices et investi temps et argent pour être devant les portes ce matin. C’était une épreuve que de se tenir devant vous pour vous dire que nous annulions. Sans parler des bénévoles qui nous nous aidés à tout préparer et à faire que cette journée se déroule sans accroc.
Et nous vous remercions tous d’avoir accepté avec dignité cette décision. Si pour une large majorité vous avez bien compris nos raisons, quelques-uns ont eu plus de mal. Nous espérons qu’avec le recul vous comprendrez tous que c’était la meilleure preuve du respect que nous vous portons. »
Philippe Souchet, organisateur du Contre-sommet
« Nous contestons le sens général vers lequel se dirige notre société ; celle de l'idéologie du développement, de l'expansion illimitée, du capitalisme libéral... mais cette opposition ne nous place pas en dehors de la société, bien au contraire ; notre désir de participer à sa transformation fait que nous en sommes pleinement partie intégrante. Aussi la première chose à laquelle nous engage ce drame du 13 novembre 2015 est un temps de deuil. Nous n'aurions bien évidemment pas faire pu faire comme si rien ne s'était passé, dépassé par une cause qui exigerait de sacrifier aux temps nécessaires de silence et de recueillement. C'est le sens de cette annulation ».
(…)
Bruno Clémentin et Vincent Cheynet, co-fondateurs de La Décroissance
votre commentaire -
Par rozalux le 12 Novembre 2015 à 16:38
SOURCE : COP21 : préparons-nous à désenfumer
C'est une brève, au journal de 8 heures de France Inter. Rien de plus qu'une brève. Selon le secrétaire d'Etat américain John Kerry, le texte final de COP 21 "ne sera pas contraignant". On se dit qu'on a mal entendu. Ainsi donc, les medias du monde entier seraient mobilisés depuis des semaines, 40 000 personnes seraient attendues au Bourget, dont les présidents américain et chinois, pour aboutir à un texte"non contraignant" ?
Si Kerry avait vraiment dit ce que l'on dit qu'il a dit, le journal aurait ouvert sur le sujet, et diffuserait déjà les réactions de Royal, Fabius et Nicolas Hulot.
Vérification faite, Kerry a bien dit ce que l'on dit qu'il a dit. Enfin presque. "Ce ne sera pas un traité, il n'y aura pas d'objectifs de réduction juridiquement contraignants, comme cela avait été le cas à Kyoto" a-t-il déclaré au Financial Times (1) (selon une traduction en français). Et les raisons de cette position américaine sont claires, l'administration Obama souhaitant tout faire pour éviter d'avoir à faire ratifier par un Congrès réticent un traité contraignant (un simple accord, lui, ne nécessite pas de ratification).
Selon toute vraisemblance, la forme juridique que prendra le traité l'accord le texte le papier signé au soir du 11 décembre constituera même l'essentiel des négociations. Ainsi, contrairement à ce que l'on pouvait penser (2), le débat ne portera pas sur l'objectif totem des 2° de réduction du réchauffement au cours de ce siècle.
Pour l'affichage, le totem sera maintenu.
L'honneur sera sauf. Mais les juristes, dans leur grande créativité sagesse, ont prévu toute une gamme de "force de contrainte" des différents types de texte, comme le détaille très bien ici (3) la chercheuse en droit international Marion Lemoine.
Attention, le passage suivant est à lire crayon en main :
"Les Parties semblent prêtes aujourd'hui à s'engager sur un ensemble de textes constituant un accord de Paris au sens large, constitué d'un accord "socle" auquel viendraient s'ajouter des décisions adoptées par la Conférence des Parties (COP). L'enjeu des négociations actuelles est de répartir les thèmes entre ces deux supports juridiques : l'objectif de 2°C se trouverait dans l'accord socle tandis que les contributions nationales (INDC) seraient consignées dans les décisions de la COP ou dans une annexe à l'accord socle".
Autrement dit, le juridisme constituera l'essentiel du débat. Pour désenfumer le communiqué final de la COP 21 (s'il y a bien un communiqué final), ce n'est pas à des climatologues, qu'il faudra faire appel, mais à des juristes internationaux.
Vous trouverez ci dessous l'ensemble des références web de ce communiqué :
VOIR LE DOSSIER /
votre commentaire -
Par rozalux le 10 Novembre 2015 à 17:44
L'évolution naturelle des espèces a donné à Homo sapiens la possibilité d'agir de plus en plus efficacement sur son environnement et de communiquer de manière de plus en plus précise avec ses congénères. Marx met en exergue que, pour cela, deux médiateurs en interrelation constante sont utilisés, l'outil et le signe.
Roland Charlionet Chercheur Inserm / Luc Foulquier Chercheur en écologie / (1) / (L'humanité du 10/11/2015)
L'activité humaine présente comme caractéristique de se déployer dans un temps long marqué par l'anticipation, la formulation du projet, la mise en oeuvre attentive, l'analyse des résultats. Ces facultés ont permis aux êtres humains de franchir un saut qualitatif complètement original dans le règne animal : la capacité de développer à l'extérieur de leur organisme individuel un monde d'objets matériels et immatériels (par exemple l'écriture, l'imprimerie et l'informatique, qui sont les supports matériels de la mémoire et du raisonnement...). Ce monde de l'être humain émancipe peu à peu les humains de leur déterminisme biologique et transforme leurs capacités physiques et psychiques. Il est constitué d'outillages performants, de paysages ruraux et urbains, de multiples langages, de réseaux de communication et de transport, de représentations et d'institutions qui structurent la vie sociale, d'oeuvres littéraires, artistiques, scientifiques et spirituelles d'une infinie diver-sité... Cette production dans tous les domaines modifie les pratiques individuelles et collectives, bouscule l'organisation de la société et son environnement naturel. Le monde de l'être humain est en édification permanente. Son essor est en phase d'extension rapide.
Si la nature a produit Homo sapiens, c'est l'humanité qui a produit l'être humain d'aujourd'hui. L'être humain n'est pas une entité qui aurait obtenu une fois pour toutes lors de son émergence ses principales caractéristiques qu'il suffirait de transmettre telles quelles de génération en génération. « L'essence humaine n'est pas une abstraction inhérente à l'individu pris à part. Dans sa réalité effective, c'est l'ensemble des rapports sociaux » (Marx, « 6e thèse sur Feuerbach »). Ce que nous sommes et ce dont nous pouvons profiter actuellement, nous le devons à l'ensemble de nos prédécesseurs et de nos contemporains qui ont contribué à édifier l'histoire de l'humanité. Aujourd'hui notre responsabilité est d'orienter le devenir de l'humanité vers un monde de plus en plus civilisé, respectueux dans ses liens à la nature.
Les êtres humains actuels font partie du monde naturel et ont en partage, avec les choses et les êtres de la Terre, son immense histoire. Tous les éléments atomiques dont nous sommes constitués ont été créés dans les étoiles. C'est une des signatures de notre appartenance à la nature universelle. Nous partageons avec l'ensemble de la matière vivante toutes les structures moléculaires biologiques qui fondent nos corps : les chaînes d'ADN, les protéines, les complexes glucidiques. Les humains ont hérité de la part des êtres vivants multicellulaires la sexualité et la mort. Dans les Manuscrits de 1844, Marx écrit : « La nature est le corps non organique de l'homme. » Ou encore : « Dire que la vie physique et intellectuelle de l'homme est indissolublement liée à la nature ne signifie pas autre chose (...) que la nature est indissolublement liée avec elle-même, car l'homme est une partie de la nature. »
L'être humain moderne a donc deux en-communs fondamentaux, le monde de l'être humain et le monde naturel. Quand il les oublie, c'est alors que surviennent les gros problèmes. Les deux en-communs fondamentaux ne sont pas indépendants l'un de l'autre : le monde de l'être humain est issu, se nourrit et se développe à partir du monde naturel. La relation de ces deux entités est donc forcément complexe, dialectique, parfois même conflictuelle. Notamment la progression de la production de biens à l'échelle mondiale et l'augmentation de la puissance opératoire des nouvelles technologies peuvent engendrer, si elles ne sont pas correctement maîtrisées, des catastrophes sur l'environnement et sur la société.
Le cas des émissions du dioxyde de carbone et des conséquences sur le climat le montre.
Selon Marx, il faut résolument combattre toute rupture entre l'homme et la nature. L'avenir ne peut s'édifier que par une prise de conscience généralisée et sans cesse renouvelée des en-communs du monde de l'être humain et du monde naturel permettant de développer, dans tous les domaines où se déploient les activités productives, les biens communs de l'humanité. Les ressources indispensables à la vie et au développement de la société (matières premières, eau, air, nourriture, énergie, sols, semences, forêts, océans, biodiversité, connaissances, etc.) sont sources de conflits locaux ou mondiaux si on les laisse dans les mains du capitalisme.
À LIRE« L'HOMME » ?, DE LUCIEN SÈVE (ÉD. LA DISPUTE) ET MARX ÉCOLOGISTE, DE JOHN BELLAMY FOSTER (ÉD. AMSTERDAM).
Il faut pouvoir les partager équitablement entre tous, et les gérer démocratiquement et durablement par tous, c'est-à-dire les considérer comme des « biens communs » (voir Elinor Ostrom). Or le progrès actuel des connaissances scientifiques et techniques, notamment des sciences de l'information, fait apparaître la possibilité d'organiser efficacement le partage et la gestion durable des biens communs entre et par tous les êtres humains. Cette possibilité, qui émerge, est une porte qui s'ouvre sur un devenir pleinement humain mais c'est une porte ouverte également sur une possible déshumanisation de la société. Rien n'est écrit d'avance bien sûr !
Comment gérer les biens communs naturels malgré la finitude du monde ? Il faut pour cela tenir compte que notre Terre, qui baigne continûment dans un flux énergétique, fonctionne en cycles complexes et intriqués les uns avec les autres, plus ou moins longs. Les êtres humains n'échappent pas à la règle. Il ne doit pas y avoir de « ruptures métaboliques » entre eux et la nature (l'utilisation du concept de « métabolisme » pour caractériser les rapports « homme/nature » est due à Marx). Si elles veulent perdurer, les sociétés humaines doivent inscrire leurs activités dans le cadre des cycles naturels. C'est une perspective que décrivaient déjà Marx et Engels. On la désigne maintenant sous le nom d'économie circulaire. L'écologie a beaucoup à perdre en ignorant l'apport de Marx et les contributions des communistes.
(1) Auteurs de « L'être humain et la nature, quelle écologie ? », note de la Fondation Gabriel-Péri.
Luc Foulquier est ingénieur – chercheur en écologie. Il a constitué en 1963 au CEA un laboratoire de radioécologie des eaux continentales et a terminé sa carrière comme chef du service environnement à l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire.
Roland Charlionet est docteur ès-sciences naturelles. Il travaille à l’INSERM de 1974 à 2009 et termine sa carrière de chercheur dans une équipe d’immunologie à Rouen.
votre commentaire -
Par rozalux le 10 Novembre 2015 à 17:31
Élisabeth Godfrid Philosophe au CNRS (L'Humanité du 10/11/2015)
Dans les tombes d'Homo sapiens, des parures de coquillages. Sous terre, des objets de la vie encore. Le tranchant de la perte, là, comme émoussé, un voile posé sur l'insupportable de la mort. Petit arrangement d'un rituel qui tente d'oublier, de faire oublier ce avec quoi on ne peut transiger: une irréversibilité. Dans l'événement de Charlie, c'est ce voile qui s'est déchiré. L'irréversibilité a resurgi crûment, violemment. Jamais plus Cabu, jamais plus Wolinski et les autres. La foule qui défila en silence, les pancartes « Je suis/Nous sommes Charlie » ont renoué le fil des coquillages, recréant à nouveau, entre les vivants et les morts, le lien du seul commun: une finitude humaine dans la contingence.
Ceux qui ont tué ont décidé ce qui, sans consentement, ne peut l'être: l'heure d'une mort, s'octroyant sur l'autre un droit de vie/de mort. La terreur s'y fonde, désir de se rendre maître de l'événement, de capturer l'insaisissable, le mouvement d'une vie, l'« entre » du passage. Cet « entre » que le rituel a tenté de réinsuffler, les « Je suis/Nous sommes Charlie » faisant comme renaître le lien que la terreur a voulu rompre, des vies reliées d'avoir en partage cela même qui les délie : la communauté de la mort.
Le politique s'inaugure dans ce sentiment d'un partage, dans la conscience d'une responsabilité envers lui, où pas un ne peut se substituer à la contingence, provoquant, avançant l'heure d'une mort. User un homme, l'affaiblir, l'épuiser jusqu'à le faire mourir, ou la fin du politique. Ne plus veiller au souffle de l'autre.
Entre les Homo sapiens réunis autour du feu et ceux d'aujourd'hui, un même souci : se mettre ensemble pour être moins vulnérables.
Vulnus, la blessure. Homme ouvert, précaire, l'à-venir de son souffle toujours incertain, ne pouvant maîtriser l'événement de l'« entre ». Le passage se fera-t-il ? L'inspire arrivera-t-il ou non ? « Tout mouvement nous découvre », dit Montaigne. Phrase vertigineuse de l'homme qui avance dans le mystère, à découvert. Mouvement passant, toujours sous le sceau d'un « peutêtre ».
Le politique ne garantit rien, juste donne les conditions de possibilité pour que tous puissent s'élancer vers ce « peut-être ». Code d'Hammourabi : « apporter les règles du droit dans le pays... de sorte que le puissant ne puisse nuire au faible ». Déclaration des droits de l'homme et du citoyen le 26 août 1789 : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. » Une écologie, alors, ne peut être que politique, l'intérêt commun étant l'autre nom d'une politique des coexistences.
Ne pas lutter ensemble contre le réchauffement climatique, ne pas restreindre l'émission des gaz à effet de serre, dépasser les 2° C, reporter toujours plus tard les moyens de les diminuer au nom des « nécessités » de la concurrence, des rivalités de puissance privées et étatiques, avancera l'heure de la mort des espèces les plus vulné-rables, humaines et non humaines, condamnées par une terreur moins visible mais tout aussi mortifère : l'indifférence de ceux qui, ne voulant pas renoncer à l'égo-centrement d'un accaparement, se substituent de fait à la contingence, s'autorisant d'être arbitre d'un droit à l'existence.
La terreur ici n'a pas besoin de guillotine pour tuer : elle fait mourir de laisser mourir. N'éprouvant pas le sentiment d'un partage, elle départage, cyniquement : ceux qui vivront et mourront un jour, ceux qui mourront non dans l'imprévisible de la contingence mais par des hommes, par leurs choix économiques, visant une politique veillant davantage sur leurs intérêts particuliers que sur l'usure prématurée.
Au bout de ces choix, villes inondées, terres asséchées, famines, violence meurtrière des frustrations et ressentiments, retour en force de ce que Freud appela l'Hilflosigkeit, la détresse, hilflos, sans aide. L'homme ici démuni, non pas d'être né mais d'être abandonné. Millions de migrants climatiques incertains même de trouver refuge.
L'enjeu de la COP21 est une écologie vraiment politique, avant l'irréversible.
S'ouvre, par cette réunion des hommes et des États, l'opportunité d'une nouvelle Renaissance, avec d'autres valeurs qui déjà montent, transformant pratiques et relations. Non plus la vision héroïque d'un individu « autonome », métamorphose en son temps féconde de s'être libéré, d'avoir défusionné, prêt à franchir et à s'affranchir, risquant de se refermer sur sa liberté jusqu'à vouloir déréguler pour son propre compte, mais les valeurs d'un individu se vivant interdépendant, solidaire des générations précédentes et à venir, des autres hommes et cultures en diachronie et synchronie. Sentiment de reconnaissance non seulement envers les hommes mais des mondes, de l'infiniment petit à l'infiniment grand, minéral, végétal, animal, chacun partie prenante dans la complexification croissante. Modifiant alors la notion même « d'environnement » référée encore à un individu en face à face au monde.
La res publica, la chose publique, vit et se renouvelle dans ce sentiment d'un trait d'union de « l'entre », dans la gratitude à l'égard de ce qui a été donné et passé, transmis des uns aux autres. Une économie politique de passeurs alliée à la curiosité, au pouvoir d'imaginer, capable par l'éducation d'inventer d'autres styles du passage: valeurs horizontales, collaboratives, coopératives, ouvrant par un faire inédit à de nouveaux métiers. Ceux des énergies renouvelables, ceux des mondes à venir, inconnus encore. Décider maintenant la transition écologique pour un développement durable soucieux des biens communs serait déjà le pont humain rétif aux prédations et privilèges, continuant à sa manière la nuit du 4 août 1789. La vie ne peut être un privilège.
votre commentaire
Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique