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Qui était le cheikh al-Nimr, ce chiite exécuté par l'Arabie saoudite?
Par rozalux dans Europe, (élections) mondialisation, luttes internationales le 5 Janvier 2016 à 18:01L’Arabie saoudite a annoncé samedi 2 janvier l’exécution de 47 personnes condamnées pour « terrorisme ». Parmi les suppliciés figure un haut dignitaire religieux chiite, le cheikh al-Nimr. Une exécution politique sous couvert de lutte contre le terrorisme, qui pourrait bien embraser la communauté chiite à l’intérieur comme à l’extérieur du royaume.
Comme on jette de l’huile sur le feu, l’Arabie saoudite a annoncé samedi 2 janvier l’exécution de 47 personnes condamnées pour « terrorisme ». En dehors du caractère massif de ces exécutions, c’est un nom parmi tous les suppliciés qui fait l’effet d’un baril d’huile lâché sur le brasier qu’est devenu le monde arabe : Nimr Baqer al-Nimr, surtout connu comme cheikh al-Nimr. Un éminent chef religieux chiite, opposant acharné et non-violent au régime saoudien incarné par la dynastie sunnite des al-Saoud.
Aussitôt rendue publique, sa mort a provoqué l’indignation de la communauté chiite. Manifestations à Bahreïn, condamnations au Liban ainsi qu’en Irak et surtout une virulente mise en garde de la part de l’ennemi intime de Riyad, l’Iran. « Le gouvernement saoudien soutient d'un côté les mouvements terroristes et extrémistes et dans le même temps utilise le langage de la répression et la peine de mort contre ses opposants intérieurs (...) il paiera un prix élevé pour ces politiques », s’est emporté le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Jaber Ansari.
La voix de la minorité chiite
Agé de 56 ans, al-Nimr était un ardent défenseur de la minorité chiite dans ce pays où la population est à 90 % sunnite. Le dignitaire avait notamment mené en 2011 la contestation populaire qui avait éclaté dans l’est du royaume, dans la foulée des « printemps arabes ». « Cheikh al-Nimr était l’une des responsabilités religieuses les plus respectées de la communauté chiite. Il était un opposant assez déterminé. Contrairement à d’autres dirigeants qui avaient à partir de 1993 ouvert un dialogue avec les autorités, il était hostile à ce dialogue. Mais autant que l’on sache, il n’était pas impliqué dans des actions violentes contre le régime », décrit Alain Gresh, spécialiste du monde arabe, ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique et directeur du journal en ligne Orient XXI.
Un non-violent qui avait été arrêté en juillet 2012. Arrestation lors de laquelle il avait été accusé d’avoir ouvert le feu sur les forces de l’ordre, sans que ces assertions soient vérifiées, et avait lui-même été blessé par balle entraînant plusieurs mois d’hospitalisation. Les autorités saoudiennes lui reprochaient « essentiellement de provoquer la division entre les musulmans et de mettre en cause l’unité nationale », explique Alain Gresh. Aussi, « on lui reprochait évidemment d’avoir des relations avec l’Iran, ce qui était sans doute le cas, mais au sens où de nombreux religieux chiites ont des relations avec ce pays », ajoute-t-il.
Ce chef religieux avait ensuite été condamné en 2014 à la décapitation suivie de crucifixion pour « terrorisme », « sédition », « désobéissance au souverain » et « port d’armes » par un tribunal de Riyad spécialisé dans les affaires de terrorisme. « Lors de son procès, l’accusation s’est essentiellement appuyée sur ses prêches. Donc, il a surtout été condamné pour ses sermons, fait remarquer Adam Coogle, spécialiste du Moyen-Orient à Human Rights Watch. Son procès a été entaché de nombreuses irrégularités. En outre, il n’a pas eu de représentation légale lors de ses interrogatoires et les autorités ne lui ont pas donné l’opportunité de bénéficier d’une défense digne de ce nom. On ne peut pas considérer qu’il ait eu droit à un procès équitable. »
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