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Patrick Peron : Le Front de gauche doit faire la différence
Dans votre région, le FN est crédité de plus de 30 % des intentions de vote. Comment expliquer cette progression ?
Patrick Peron Le Front national a fait son lit sur l’échec des politiques de droite, en particulier des années Sarkozy, et sur l’énorme déception de ceux qui attendaient du changement en 2012. Ce rejet se cristallise sur un vote extrême avec l’idée qu’il faut tester cette troisième voie pour voir ce qu’elle vaut. Droite et gauche pour ces électeurs, c’est pareil. La fermeture des hauts-fourneaux d’ArcelorMittal avec François Hollande au pouvoir a laissé des traces. Sur le marché d’Hayange (ville dirigée par le FN – NDLR) où j’étais hier, beaucoup d’électeurs du FN iront voter pour ces raisons. Le FN risque également de drainer 1 ou 2 % d’électeurs supplémentaires du fait des attentats du 13 novembre. D’autres habitants, qui ne voient jamais leur situation évoluer, rejettent tout en bloc et s’abstiennent. Le Front de gauche doit parvenir à faire la différence.
Pourquoi avez-vous décidé de présenter une liste Front de gauche alors que vous partagez le bilan des majorités de gauche sortantes en Lorraine et Champagne-Ardenne ?
Patrick Perron Malgré des bilans qui ne sont pas négatifs, nous ne pouvons assumer avec le PS l’échec de la politique gouvernementale que nous combattons par ailleurs. Nous voulons regagner les consciences à une alternative politique réellement de gauche. Ce choix, ultramajoritaire parmi les communistes, s’appuie sur le constat évident du virage libéral du Parti socialiste. Entre la dernière mandature et cette campagne, il y a eu Macron. Dans cette campagne, la gauche c’est nous. Pour autant, nous ne confondons pas le bilan des régions de gauche avec celui de l’Alsace, gérée par la droite. Un seul exemple suffit à le démontrer : la gratuité des transports et des fournitures scolaires dans les lycées mise en place dans les deux régions de gauche n’existe pas dans celle de droite. En revanche, l’Alsace verse pas mal d’argent pour des formations pilotées par les entrepreneurs au détriment de l’Afpa ou des lycées professionnels.
Pourquoi avoir fait de la vie quotidienne des habitants et de la lutte contre l’austérité vos grandes priorités ?
Patrick Peron En intitulant notre liste « Nos vies d’abord », nous disons que notre préoccupation première est d’aller à la rencontre des citoyens, de dialoguer avec eux. Il y a ces 150 000 salariés frontaliers qui passent tous les jours au Luxembourg, en Allemagne, en Suisse, en Belgique, et pour qui la question des transports est essentielle. Ces habitants qui refusent de voir leur ville coupée en deux par l’autoroute, dont le trafic de 200 000 véhicules par jour traverse déjà de grandes agglomérations. Ou encore cette jeunesse désabusée de la politique qui est au chômage ou ces étudiants en lutte à Metz pour obtenir des moyens pour le logement. Partout un même constat s’impose : ce n’est pas la casse du service public qui réglera le problème du chômage ou de la précarité. Le service public, moyen de cohésion sociale et territoriale, doit être maintenu.
L’emploi est au cœur de votre campagne, la région a-t-elle des leviers pour agir?
Patrick Peron Nous proposons une autre utilisation des fonds publics, à commencer par le CICE. Nous proposons que ces sommes soient reversées aux collectivités pour leur redonner les moyens d’investir. Mon ancien patron d’ArcelorMittal, sixième fortune mondiale, perçoit du CICE qui tombe directement dans l’escarcelle de ses dividendes. À côté, toute une niche d’entreprises qui ne délocalisent pas, les artisans, des PME, galèrent. En Moselle, 58 millions d’euros ont été distribués et 1 200 emplois supprimés. À l’inverse, nous proposons la création d’un fonds régional de développement pour aider les entreprises qui embauchent, pas celles qui licencient.
Source : Patrick Peron : « Le Front de gauche doit faire la différence » | L'Humanité
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